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Comme une envie d'écrire...
22 décembre 2015

Allô le monde...

Pardonnez-moi pour le pathos de ce message... Il va falloir vous y faire parce que la fin d'année est très difficile pour moi et parce que cette année, le 31 décembre, ça fera cinq ans que je suis une maman désenfantée... Parce que c'est pas rien cinq ans. Cinq ans, c'est une demi-décennie... Parce que les bouquins disent que 70% des couples se séparent dans les cinq ans suivant la mort d'un enfant, et que notre couple a survécu dans la tempête. Alors, même si ça n'intéresse pas grand monde, pour nous, cinq ans, c'est un vrai cap.

Il n'y a pas si longtemps, quelqu'un m'a sorti un solide "le monde ne tourne pas autour de toi" lorsque j'ai parlé de ne pas fêter le nouvel an.

Je sais que le monde ne tourne pas autour de moi. Croyez-moi, je le sais. Je me souviens, quand j'étais ado, le nombre de fois où ma mère me sortait ça. "Elisabeth, le monde ne tourne pas autour de toi !" Je l'entends encore. Il faut croire que j'étais quelqu'un de très égocentrique. Et en fait... depuis le temps, j'ai connu la collectivité du foyer maternel, l'indifférence de la rue... Je pense que j'ai compris que mon nombril n'était pas le centre de l'univers.
Et puis, il y a cinq ans, il y a eu l'Epreuve avec un E majuscule. Le truc que je n'aurais jamais cru vivre. Le truc dont je n'aurais jamais cru que je pourrais me relever. Il y a cinq ans, j'ai perdu ma fille.

Là, définitivement, j'ai compris que le monde ne tournait pas autour de moi. Parce que ce jour-là, ma vie s'est arrêtée et le monde, lui, a continué de tourner. Si vite...

Et en fait, je ne demandais même pas que le monde s'arrête pour moi... ou pour elle... Je ne demandais même pas que chacun considère ma douleur et mon désespoir. On a tous conscience que là, là-bas, ailleurs, près ou lointain, des gens meurent et des familles pleurent. Mais on ne s'arrête pas pour ça. C'est normal. En revanche, je pense que j'aurais aimé un tout petit peu plus de compassion et de considération de la part des gens de ma famille. De la part des gens qui disent m'aimer...

Je pense que j'ai le droit de ne pas boire de champagne le jour anniversaire de la mort de ma fille. Même si concrètement, le pays entier est en fête. Je pense que j'ai le droit de demander à ce qu'on me fiche la paix ce jour-là. Je pense que les gens qui m'aiment devraient non seulement respecter ça, mais aussi trouver cela normal. Je pense qu'il est totalement malsain et contre-nature de faire la fête le jour anniversaire de la perte d'un proche. Je pense qu'il est incensé d'exiger cela de qui que ce soit. Et si je ne demande pas au "monde" de s'arrêter, je demande juste à ma famille de me respecter...

Et puisqu'aujourd'hui, j'ai été obligée de larver devant un con de médecin qui était le seul à prendre ma fille, malade, en urgence, j'ajouterais que j'ai aussi le droit de ne pas être prise de haut par un médecin qui ne me connait ni d'Eve ni d'Adam, simplement parce que je n'ai pas encore entamé la vaccination de ma cadette. Je pense que ces médecins devraient apprendre, eux aussi, que le monde ne tourne pas autour d'eux. Ils devraient apprendre l'humilité, l'échec, et l'erreur. Je pense, enfin, qu'ils n'ont le droit de donner de leçon à personne et encore moins à une maman qui a vu mourir sa fille au sein d'une médecine aussi impuissante qu'absurde.

Je pense que le monde ne tourne pas autour de moi. Mais je pense aussi que nous ne considérons pas assez le monde.

Cette année, je refuse de fêter le passage à la nouvelle année. Car il y a cinq ans, quand tout le monde se disait "bonne année" en s'embrassant, joyeux et un peu saoul, moi je pleurais la disparition de ma fille seule sur mon canapé. Ce jour-là, les médecins, psy, assistantes sociales, éducateurs, ceux qui ont toujours la manie de nous expliquer la vie, ce jour-là, ils n'étaient pas là pour me tenir la main, pour m'expliquer comment je pouvais survivre à cela. Ni comment l'annoncer à mes deux petits garçons qui attendaient avec impatience que leur soeur rentre de l'hôpital. Ce jour là, il n'y avait personne.

Finalement, il y a bien une chose pire que la mort. L'indifférence...

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Commentaires
P
Bonjour<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai ressenti la même chose de la part de ma famille, l'indifférence, ou presque, disons qu'ils n'ont pas insisté pour savoir si j'allais vraiment bien...suffisait que je dise "oui ça va aller" et zou on passe à autre chose. Je ne comprends même pas qu'on pose la question dans un cas comme ça, évidemment que ça ne va pas, du coup, bêtement, je répondais "oui ça va", parce que j'avais l'impression qu'un "non" ne m'apporterais pas plus de soutien.<br /> <br /> <br /> <br /> Tout ça pour dire que je te comprends, je suis choquée que ton entourage n'accepte pas que tu n'aies pas envie de faire la fête.<br /> <br /> <br /> <br /> Courage.
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A
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> Je te comprend je suis pareil <br /> <br /> mon petit ange est né le 05/10/2008 et il est parti le 20/11/2008.<br /> <br /> Bon courage
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